Ce sont plusieurs événements de ces derniers jours qui ont inspiré l’édito. Tous ont un point commun: ils renvoient à des mots finissant en isme.
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Négationnisme, c’est le premier. Lundi, on apprenait la mort d’un certain Robert à Vichy. Un octogénaire aux thèses si abjectes que son nom ne mérite même pas d’être prononcé. Je préfère citer le grand Badinter. Qui n’avait de commun avec le défunt que le prénom. Lors d’un procès devenu mythique, Robert Badinter avait qualifié son adversaire de “faussaire de l’histoire”.
De quoi me rappeler une discussion avec ma grand-mère. Il y a des années de cela, elle avait visité les camps de concentration. A 80 ans, elle en gardait un souvenir intacte. Elle avait raconté à l’adolescente que j’étais les montagnes de cheveux. Elle avait murmuré, comme si le volume de sa voix pouvait atténuer l’horreur, que, dans les camps, on interdisait aux femmes d’aller uriner. Aux yeux de ma grand mère, c’était la négation suprême de l’humanité.
Néonazisme, un autre mot en isme, dont on peine à croire qu’il survit dans nos démocraties. Et pourtant. C’était la semaine dernière. La libraire du Boulevard, au cœur du quartier de Plainpalais, expose de la littérature antifasciste. De quoi réveiller la bête. La vitrine est brisée. Des sigles tagués désignent les auteurs du saccage. Des extrémistes de droite. N’en déplaisent à ces “chemises brunes” de pacotille, la réaction de solidarité est plus forte. Des centaines de post-it fleurissent sur la vitrine. Des messages de soutien viennent recouvrir la blessure. Parmi eux ces mots, je cite: “j’ai 76 ans. Après avoir vécu la guerre. Je pensais que c’était fini, que les nazis ne reviendraient plus. J’en pleure.” ou encore cet autre qui écrit: “l’ignorant détruit ce qu’il ne comprend pas.”
L’ignorant l’idiot, l’homme bouffi par la haine. C’est celui dont le visage apparaît sur une vidéo. Racisme, un troisième mot en isme. La vidéo en question a été tournée dans un avion. Vous l’avez sûrement vue comme plusieurs millions d’internautes. La scène se déroule sur un vol Ryan air. Un passager blanc refuse d’être assis à côté d’une femme noire. Il l’insulte copieusement. Jusqu’à ce qu’on la change, elle, de place! Que faut il garder de cet épisode? Uniquement le mouvement de protestation de quelques passagers qui demandent au vieil acariâtre de se taire.
Les thèses d’un vieil homme, une vitrine vandalisée et un incident dans un avion. Pas de quoi fouetter un chat, me direz vous. Pas de quoi non plus s’alarmer face à une éventuelle montée de ces fléaux en isme. Sauf que… un seul acte de ce type, c’est déjà trop. Face à ces comportements, il faut encore et toujours marteler un message de résistance. Celui de Joachim Ronneberg. Un Norvégien mort, lui aussi dimanche, à 99 ans. En 1943, il avait porté un coup d’arrêt au programme nucléaire des nazis en sabotant une usine dans son pays.
Se rappeler aussi du courage d’Eolo Morenzoni. Il quitta le Tessin pour se battre en Espagne contre le fascisme. Eolo parti à 17 ans avec quelques chaussettes et des marrons dans son sac. “Si je n’y vais pas, je ne pourrais plus me regarder en face” avait il écrit à ses parents avant de rejoindre les brigades internationales.
Je ne prétends pas avoir le courage de prendre les armes. Juste celui de ne pas rester silencieuse. « Indignez vous”, lançait Stéphane Hessel. Face à la haine ordinaire, le message du résistant français demeure plus que jamais d’actualité: Indignons nous!