Le Conseil d’Etat genevois se refuse à ouvrir une enquête administrative contre Patrick Baud-Lavigne. C’est Le Courrier qui l’annonçait mardi. Le chef de cabinet du conseiller d’Etat Pierre Maudet était du voyage à Abu Dhabi en novembre 2015. Il a lui aussi profité du cadeau de l’ami d’un ami du magistrat. Un présent estimé à plus de 11’000 francs par personne comprenant le vol aller-retour en business class, l’hôtel de luxe pour 4 nuits et une place pour le Grand Prix de Formule 1. Le chef de cabinet, qui n’a pas répondu à notre sollicitation, se voit donc épargné car il avance que ce voyage a été effectué à titre privé. Exactement, le même argumentaire que Pierre Maudet. Or, plusieurs éléments tendent à démontrer que ce séjour n’était pas si privé…
[zoomsounds_player source="https://vod.infomaniak.com/redirect/mediaonecontactsa_2_vod/folder-40715/mp3-476/patrick-baud-lavigne-et-pierre-maudet-.mp3" artistname="Le gouvernement genevois se refuse à ouvrir une enquête administrative contre Patrick Baud-Lavigne" songname="" config="skinwavewithcomments" playerid="" waveformbg="http://www.onefm.ch/player/wave_onefm.png" waveformprog="http://www.onefm.ch/player/wave_onefmprog.png" thumb="" autoplay="off" cue="on" enable_likes="off" enable_views="off"]
Il y a bien sûr la rencontre “fortuite”, selon les termes de l’édile, avec le prince-héritier Mohammed bin Zayed dans le hall de l’Emirates Palace. Un échange a eu lieu dont on ignore la teneur. Pierre Maudet affirme qu’il a “brièvement devisé sur le parvis” avec lui sans vouloir en dire plus. Reste que c’est bien en sa qualité de conseiller d’Etat que le ministre genevois a pu accéder au no 1 du régime. Les deux hommes ne sont pas des intimes: ils ont fait connaissance six mois plus tôt à Dubaï lors d’une visite officielle de la délégation économique du canton.
Pierre Maudet a aussi visité le centre de vidéosurveillance en compagnie du vice-président de l’Emirat et chef de la sécurité intérieure, Hazza bin Zayed. Cette visite du 28 novembre 2015 a d’ailleurs fait l’objet d’une photo (voir ci-dessus) et d’un compte rendu officiels. S’est-il alors agi d’une simple visite de courtoisie, comme le minimise aujourd’hui le conseiller d’Etat? Non, si l’on en croit la dépêche de l’agence emirati WAM, datant du même jour. Elle rappelle expressément le titre de ministre de Pierre Maudet et stipule que les deux hommes ont eu des discussions “sur la manière de renforcer la coopération économique et sécuritaire entre les Emirats arabes unis et la Suisse”. De quelle manière? Mystère. Mais on est donc loin d’une visite strictement privée. Ce que Pierre Maudet lui-même nous concédait voici deux ans. Il indiquait “que l’on peut considérer cette brève visite au centre de commande de la police comme réalisée ès qualité, dans une perspective officielle”.
Enfin, et cela n’a jamais été rendu public à ce jour, Pierre Maudet a rencontré l’ambassadrice de Suisse lors de son séjour.
C’est le troisième élément troublant de cette visite qui l’est tout autant. Durant son voyage à Abu Dhabi, l’édile a partagé un café avec l’ambassadrice de Suisse sur place, Maya Tissafi, et l’attaché de défense de l’époque Gabriel Lüchinger, aujourd’hui collaborateur personnel du conseiller fédéral Guy Parmelin. Et c’est par l’entremise de Patrick Baud-Lavigne que cette rencontre de courtoisie a pu se faire. Selon nos informations, c’est le chef de cabinet du conseiller d’Etat genevois qui a annoncé la venue du ministre à l’ambassade. Une ambassade qui ne cachait pas, lors de nos échanges avec elle il y a deux ans, sa stupéfaction à voir un élu local rencontrer des dignitaires du régime émirati. Dans son esprit, il n’y avait aucun doute sur le caractère public du séjour vu les différentes personnalités invitées chaque année au Grand Prix de Formule 1. Le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) tient toutefois à rectifier aujourd’hui que « si ce voyage avait été officiel, l’ambassade aurait été impliquée dans la préparation de ce voyage. Or, cela n’a pas été le cas. »
@Raphaelleroy