L’islamologue Tariq Ramadan, inculpé pour viols sur deux femmes, a clamé jeudi son innocence devant la cour d’appel de Paris chargée de statuer sur son éventuelle mise en liberté, qu’il a obtenue. C’était sa première apparition publique depuis son incarcération.
La libération de l’islamologue suisse de 56 ans est soumise au versement d’une caution de 300’000 euros, a précisé son avocat Emmanuel Marsigny. M. Ramadan, qui doit remettre son passeport suisse, a interdiction de quitter le territoire, d’entrer en contact avec les plaignantes et certains témoins. Il devra pointer une fois par semaine au commissariat.
La chambre de l’instruction a rendu cette décision, non susceptible d’appel, après avoir entendu M. Ramadan plaider lui-même sa cause avec énergie lors d’une rare audience en public jeudi après-midi, alors que le huis clos est quasi systématique à Paris en matière de détention, a constaté un journaliste de l’AFP.
« Je vais rester en France »
« J’irai fuir où? Alors que tout va vers mon innocence (…) Je vais rester en France et défendre mon honneur et mon innocence », avait-il déclaré depuis le box pour tenter de convaincre la chambre de l’instruction de faire droit à cette quatrième demande de mise en liberté.
Celle-ci avait été rejetée la semaine dernière par les juges qui craignent notamment des « risques de pression » sur les deux femmes dont les plaintes ont lancé l’affaire à l’automne 2017 et débouchées sur la double inculpation de M. Ramadan le 2 février.
La défense avait fait appel du rejet de cette demande, déposée dans la foulée d’une nouvelle audition où M. Ramadan avait admis des relations sexuelles « consenties » avec ses accusatrices. Après un an de dénégations, la révélation d’échanges SMS sans ambiguïtés l’avait contraint à changer de version.
« Qui a menti le plus? »
« Je voudrais que vous décidiez en votre âme en conscience, non pas parce que je m’appelle Tariq Ramadan et qu’on m’a diabolisé dans ce pays », a-t-il lancé aux juges. « Je veux bien qu’on me reproche d’avoir menti pour protéger ma famille, ma fille qui est dans la salle. Mais qui a menti le plus? Qui a instrumentalisé le mouvement #MeToo? », s’est défendu M. Ramadan, accusant ses accusatrices de se répandre dans les médias.
A tour de rôle, les avocats de la défense et des deux plaignantes se sont renvoyés les accusations de menaces sur les protagonistes du dossier et leur entourage. « Je viens de passer dix mois en prison, je suis innocent, je le paye de ma santé, je ne peux plus marcher normalement », a plaidé M. Ramadan, qui souffre d’une sclérose en plaques.
Invoquant à nouveau le « risque de pression sur les plaignantes et les témoins », le parquet général a requis le rejet de la demande. La décision était attendue dans la soirée de jeudi.
Source ATS