On parle beaucoup ces jours-ci d’un éventuel accord commercial entre la Suisse et les Etats-Unis.
Oui, parce que l’on n’a jamais vu autant de conseillers fédéraux et de hauts fonctionnaires traîner du côté de Washington. Alors ça donne un peu de consistance aux fantasmes récurrents d’accord commercial. Ça va peut-être finir par arriver, d’ailleurs.
Comment se fait-il que la Suisse n’ait pas d’accord commercial récent avec les Etats-Unis ? Comme avec la Chine ?
Oui, l’accord de 2014 avec la Chine. La Suisse a complété à cette occasion un impressionnant tableau de chasse dans le registre du libre-change : Inde, Indonésie, Philipines, Japon, Corée, Thaïlande, Vietnam, Golf, Amérique centrale, Colombie, Chili et j’en passe. Il y a le Canada aussi, depuis exactement dix ans. Mais pas les Etats-Unis.
Et pourquoi pas dans le fond ?
Parce que le problème avec les Etats-Unis, c’est qu’ils commencent toujours par vouloir parler d’agriculture. Ils voudraient pouvoir écouler leurs surplus de produits agricoles non transformés. Des céréales, des pommes de terre, du boeuf au hasard. Dans les années 2000, la Suisse était déjà demandeuse de négociations avec les Etats-Unis. Ça n’a pas fait long avant que Berne renonce. Le niveau de protection de l’agriculture suisse est bien trop élevé et consensuel pour en discuter avec des Américains.
Mais il n’y a pas que l’agriculture à échanger.
Non, bien entendu. Mais pour le reste, la Suisse exporte aux Etats-Unis pour près de 15 milliards de francs de plus qu’elle n’importe. Or, les Etats-Unis veulent actuellement réduire leurs déficits commerciaux. Ce ne sont pas non plus des circonstances optimales pour accentuer le libre-échange.
L’accord commercial de la Suisse avec le Canada est pourtant un succès pour les deux parties.
Oui, mais il est très partiel. Comme tous ces accords commerciaux, d’ailleurs. Dans le domaine agricole, la Suisse importe un peu de blé bien taxé, et pour 25 millions de francs de viande de cheval chaque années du Canada. Les facilitations ne portent en fait que sur des produits transformés. Les pommes frties surgelées par exemple. Et puis cet accord n’a pas fait évoluer spectaculairement les échanges. Avec la Chine non plus d’ailleurs.
L’Union Européenne a aussi un accord commercial en suspens avec les Etats-Unis.
Oui, et qui butte aussi principalement sur l’agriculture. Et les organismes génétiquement modifiés aux Etats-Unis, qui justifient le protectionnisme agricole européen. Mais Bruxelles a aussi conclu un accord avec le Canada récemment.
C’est peut-être cela qui va débloquer les choses.
Oui, le précédent Canadien. C’est ce que l’on entend beaucoup ces temps-ci. Que Bruxelles pourrait finalement conclure quand même quelque chose avec Washington. Hors agriculture. Et c’est aussi cela qui nourrit un certain empressement en Suisse. Ne pas se retrouver avec un accord américano-européen qui favoriserait des entreprises européennes au détriment des suisses. Mais ça ne semble pas être pour demain. La bonne stratégie, dans le fond, ce serait peut-être d’ouvrir préventivement et symboliquement des négociations. Et d’attendre qu’une nouvelle dynamique américano-européenne sans agriculture fasse avancer les choses.
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