A Genève, troisième jour du procès du chauffeur de taxi, d’origine éthiopienne. Il est accusé du meurtre et du viol de la petite Semhar, 12 ans. Il l’aurait ensuite cachée sous le lit, chez elle, dans le quartier de la Tambourine à Carouge. Son corps n’a été retrouvé que le lendemain du crime. Depuis six ans, il clame son innocence. Cet après-midi, une forte émotion a étreint la salle du tribunal avec le témoignage de la maman de la fillette et de sa sœur. Le récit de la journée.
La présidente du Tribunal, Isabelle Cuendet, se livre à un vrai travail d’instruction. Elle pose des questions très précises à la mère de Semhar. Sur son emploi du temps la journée précédent le meurtre et le jour même. Elle essaie de confronter la version de l’accusé sur le fameux lit sous lequel se trouvait le corps de la victime. De l’ADN lui appartenant a été retrouvé sur celui-ci. Et il a prétendu avoir réparé le lit deux mois auparavant. Faux ! répond la mère, c’est elle-même qui l’a réparé.
Viennent ensuite les questions sur une éventuelle dispute «pour rire» entre Sehmar et l’accusé le jeudi avant le meurtre…
C’est à ce moment-là que l’accusé aurait laissé des traces d’ADN sur le poignet de la petite. La mère n’a pas vu cet échange. Elle réfute. Puis vient l’épisode du restaurant. L’accusé avait amené la mère et son fils malade à l’hôpital. Il a indiqué lors de son interrogatoire s’être bien rendu après, vers 19 h 30 dans le quartier de la Tambourine pour donner un cours de conduite secret à Semhar. Mais elle ne serait pas venue et il serait reparti, sans l’avoir vu une demi-heure après. Vers 20 h 40, il téléphone à la mère de Semhar pour l’inviter au restaurant. avec ses deux autres enfants, qui étaient avec elle. Une chose très inhabituelle, explique la maman de Semhar.
Le restaurant se trouve près de la gare. Lorsqu’elle arrive, l’accusé a déjà commandé des plats.
Pendant ce dîner, la mère appelle une dizaine de fois sa fille, sans succès. Elle s’inquiète. Mais lui la rassure, “tu sais ta fille est intelligente, elle va t’attendre à la maison” lui dit-il. A la question de la présidente: aviez-vous l’impression qu’il faisait tout pour ne pas rentrer à la maison? La mère répond : oui, j’en avais l’impression. Il a même commandé une bière pour lui et pour moi, à la fin du repas….
L’interrogatoire se poursuit avec les avocats, de la famille de la victime d’abord, qui demandent à la sœur de Semhar d’expliquer quels étaient leurs rapports. Émotion dans la salle, elle pleure, sa mère aussi. L’assemblée retient son souffle. La Présidente lève la séance.
A la reprise, c’est au tour des avocats de la défense de procéder à l’interrogatoire.
Maître Hayat questionne la maman sur son inquiétude au restaurant. Une question qui fait bondir son conseil, Robert Assaël. Vous n’allez tout de même pas plaider le manque d’inquiétude? Remise à l’ordre de la Présidente du tribunal criminel. La défense annonce alors que leur client veut s’exprimer. L’accusé prend la parole. « Je comprends la douleur et la colère de la famille mais ça ne fait pas de moi un coupable. Depuis le premier jour en prison, j’ai vécu avec deux choses, la perte de la personne que j’aimais et la douleur d’être soupçonné. Le premier procureur m’a vu coupable, dit-il et depuis, j’ai décidé de garder le silence ».
Vient alors le témoignage du père de la fillette.
Il se dit affligé, que depuis six ans, l’accusé nie les faits. Il le connaît depuis très longtemps. Mais il ne savait pas qu’il avait une relation avec son ex-femme. Sur sa personnalité, il dit qu’il est un homme à femme, un beau parleur. Il parle ensuite de sa fille disparue. La famille est en pleurs. Il est près de 19 heures dans la salle du tribunal, quand l’audience prend fin.