Déjà parue en version allemande sous le titre de sein Fall (Editions Stämpfli), l’enquête de Philippe Reichen, journaliste au Tages–Anzeiger sortira dans quelques semaines en Suisse romande. Le vertige du pouvoir (Editions Cabédita) bénéficiera d’un tirage deux fois plus conséquent, 3000 exemplaires, pour son arrivée en librairie début janvier.
L’auteur de l’enquête, Philippe Reichen, ex-chroniqueur de Radio Lac nous a fourni la dernière version de son document en version française. Avant-première.

Sous la couverture, des éloges.
La photo accroche, elle montre le Conseiller d’Etat posant la main sur un détonateur. Si tout laisse croire à une enquête explosive, la surprise pour le lecteur est à l’intérieur de ce livre à la fois objectif, humain et flatteur envers un responsable politique hors du commun. Au fil des pages, un véritable florilège de compliments alimente les deux tiers du livre. Il est le plus jeune maire de Genève… Le Conseiller d’Etat le plus jeune de l’histoire de Genève… Sa capacité de travail, son dynamisme et ses talents d’orateurs sont incontestés… Pierre Maudet sait ce qui préoccupe les genevois…Il fait comprendre aux habitants que ses décisions ont un impact direct sur leur quotidien. De l’enfant prodige au jeune élu actif et admiré, il franchit les étapes et en brûle certaines au passage sans s’encombrer des obstacles. Il perçoit les résistances comme stimulantes, analyse l’auteur.
Des jalousies cachées et pas d’ennemi.
En bon observateur de la vie politique genevoise, Philippe Reichen rappelle que la carrière de Pierre Maudet est incroyablement inspirante et rassembleuse. Tous les signaux le donnaient vainqueur pour succéder à Ignazio Cassis à Berne.
L’enquête restitue également les liens étroits entre Pierre Maudet et Antonio Hodgers: si l’actuel Président du Conseil d’Etat ne manque pas une occasion de porter des coups à son prédécesseur, l’auteur rappelle qu’il est surtout un compagnon de route politique depuis leur jeunesse. Leur complicité d’hier est qualifiée d’entente parfaite notamment par la signature d’un pacte politique spectaculaire.
Autre ironie du sort, le procureur général Olivier Jornot, chargé de l’affaire dès 2018, fut en son temps soutenu par Pierre Maudet pour redorer son image de bad boy des libéraux. Ensemble, souligne Philippe Reichen, ils effectuent des annonces impressionnantes comme celles des opérations policières ciblées, d’envergure et conçues à long terme. Au sujet de Guillaume Barazzone, l’auteur estime qu’ils ont su utiliser les fautes des politiciens établis pour se profiler. Les amis et les détracteurs de Pierre Maudet ont eu le point commun de rester en second plan. Philippe Reichen analyse: ses principaux adversaires ont grandi dans son ombre.
Ce que dit le livre sur l’affaire.
Le livre rappelle la chronologie des faits. Il n’y aura pas de rebondissement majeur mais une explication sur le travail d’enquête du journaliste Raphaël Leroy, alors brimé dans sa liberté d’expression alors qu’il travaillait au Matin Dimanche. Plus tard, rédacteur en chef de Radio Lac, il put alors disposer d’une liberté totale pour révéler l’affaire au grand jour. Cet éclairage permettra au lecteur de mieux saisir l’emballement médiatique qui a suivi même si les éléments principaux sont aujourd’hui connus de la justice et du public.
Pierre Maudet et l’auteur sont restés à distance.
Pierre Maudet et son biographe se sont rencontrés. Puis l’entourage du Conseiller d’Etat s’est montré trop protecteur aux yeux de l’auteur qui a préféré prendre ses distances. Philippe Reichen, en accord avec son éditeur, a préféré nourrir l’essentiel de son enquête à travers d’autres témoignages et d’une riche sélection d’articles de presse.

Le journaliste de Tamedia Philippe Reichen auteur de » Pierre Maudet, le vertige du pouvoir »(KEYSTONE/Salvatore Di Nolfi)
Pour conclure son livre, l’auteur aurait peut-être pu s’inspirer d’un article de La Tribune de Genève non cité dans son document. Paru en 2012, les lignes du journaliste d’Olivier Francey paraissent aujourd’hui prémonitoires:
Véritable météore politique, Pierre Maudet ne suscite que deux sentiments: l’admiration ou l’agacement. Un chemin sans réelles fautes de parcours qui incite à rechercher les failles.
La morale de l’histoire est sans doute là. Les Genevois pourront prochainement se forger leur opinion.